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Psychothérapie



Psychothérapie
Traitement, au moyen de procédés psychologiques, de la souffrance psychique de l'individu, qu'elle soit momentanée ou non, qu'elle se manifeste par un trouble psychosomatique, une difficulté d'adaptation ou une maladie mentale.
La psychothérapie diffère de l'assistance informelle que chacun peut recevoir d'autrui. Elle est tout d'abord menée par un psychothérapeute qui a reçu une formation spéciale et qui a ainsi une pratique patiente de l'écoute du sujet. La psychothérapie est ensuite encadrée par des théories sur les causes des troubles et les méthodes permettant de les soulager. La communication étant le premier moyen de guérison dans la plupart des formes de psychothérapie, la relation entre le thérapeute et le patient est bien plus importante que dans les autres traitements médicaux.
L'utilisation de moyens psychologiques pour remédier aux troubles mentaux et émotionnels est ancienne; elle a longtemps pris la forme de procédés magiques d'inspiration religieuse. Les premières tentatives de rationalisation de la pratique psychothérapeutique datent de la fin du XVIIIe siècle, lorsque le médecin autrichien Franz Anton Mesmer utilisa une forme de suggestion appelée le magnétisme animal. À la fin du XIXe siècle, l'hypnose connut son heure de gloire comme moyen de suggestion dans le traitement de certains dérèglements psychologiques, sous l'influence du neurologue français Jean Martin Charcot à l'hôpital de la Salpêtrière, à Paris.
La psychothérapie psychanalytique

Les démonstrations par Charcot des valeurs thérapeutiques de l'hypnose furent réutilisées par Sigmund Freud, le fondateur de la psychanalyse, qui détourna l'état hypnotique de sa fonction de suggestion et l'employa pour aider ses patients névrotiques à retrouver les souvenirs pénibles qu'ils avaient refoulés. Cette technique lui permit d'aider ses patients, mais aussi de rassembler les éléments fondamentaux de la théorie psychanalytique en postulant l'existence d'un inconscient psychique, qui constitue le champ d'investigation de la psychanalyse. Freud pensait que le développement d'une personne comporte des pulsions sexuelles et des pulsions d'agression que le sujet ne peut pas tolérer et qui sont rejetées de la conscience. Ces représentations psychiques des pulsions sont refoulées (elles sont inconscientes), mais cherchent constamment un exutoire; elles peuvent se manifester comme symptômes d'une névrose. Selon Freud, la meilleure preuve de l'existence du processus de refoulement est la résistance que le malade oppose au surgissement des souvenirs douloureux qui permettent d'éclairer les causes des névroses, ces dernières ayant leur source dans l'enfance. Freud pensait que ces symptômes pouvaient en effet disparaître si on amenait au niveau conscient les émotions et les fantasmes refoulés. Il utilisa d'abord l'hypnose comme moyen d'accès à l'inconscient, puis lui préféra la technique dite de la libre association : le patient exprime tout ce qui lui vient à l'esprit au sujet de ses rêves, de ses fantasmes ou de ses souvenirs.
Il accorda par la suite une grande valeur au transfert, c'est-à-dire à la réponse émotionnelle du sujet au thérapeute. Le transfert représente, selon Freud, les sentiments antérieurs du patient envers les membres de sa famille. L'association libre et la réaction de transfert constituent le pivot des séances de psychanalyse freudienne, qui peuvent se dérouler de trois à cinq fois par semaine.
Écoles psychanalytiques
Les meilleurs disciples de Freud s'opposèrent à lui sur des points importants de la théorie et de la technique thérapeutique et fondèrent leurs propres écoles.
Jung

Une école influente fut celle du psychiatre suisse Carl Gustav Jung, selon qui Freud avait exagéré l'importance des instincts sexuels en tant que moteur du comportement. Jung pensait que l'individu doit aussi réaliser ses potentiels non sexuels, sous peine de névrose. Les thérapeutes jungiens aident leurs patients à prendre conscience de leurs ressources intrinsèques de développement et de leurs capacités à traiter les conflits. Les rêves et l'art permettent d'exprimer les associations du patient avec les images inconscientes qui, selon Jung, sont partagées par chacun.
Adler
Le psychologue et psychiatre autrichien Alfred Adler fut un autre élève de Freud qui rompit avec le maître. Lui aussi remit en question la place prépondérante accordée à la sexualité dans la théorie freudienne. Il développa l'idée du sentiment d'infériorité dont tous les enfants souffrent parce qu'ils sont petits et sans défense et théorisa le complexe d'infériorité. Pour Adler, les troubles psychologiques proviennent d'une manière de vivre inadéquate, qui recouvre des opinions et des objectifs erronés et un intérêt social sous-développé. Le travail du thérapeute consiste dès lors à rééduquer le patient, à lui faire prendre conscience de ses erreurs et à l'encourager à développer son intérêt social.
Fromm, Horney et Erikson
Quelques élèves de Freud, notamment Erich Fromm, Karen Horney et Erik Erikson élaborèrent une théorie des névroses qui insistait sur le rôle des influences sociales et culturelles sur la formation de la personnalité. Tous trois quittèrent l'Allemagne nazie dans les années 1930 et contribuèrent à implanter la psychanalyse aux États-Unis.
Fromm pensait que le problème fondamental de tout humain est une sensation d'isolement provoquée par la séparation de la mère. Pour lui, le but de la vie et de la thérapie est de s'orienter, de planter ses propres racines, et de trouver la sécurité en s'unissant aux autres tout en gardant son individualité.
K. Horney estimait que les névroses proviennent d'une anxiété fondamentale due à un manque d'amour et de respect dans l'enfance. Un enfant ayant souffert de telles circonstances développe des mécanismes d'hostilité refoulés envers autrui. Le comportement névrotique bloque les capacités de l'individu à vivre une croissance saine et à s'adapter aux changements. La thérapie doit alors dissiper l'illusion que le patient nourrit sur ses blocages de défense, c'est-à-dire les identifier et les éclairer, puis l'aider à mobiliser sa force constructive naturelle pour mener les changements à bien.
Erikson soutenait, comme Horney, que les humains sont capables de progresser toute leur vie. Le moi de l'individu est responsable de ces changements; il a besoin d'un environnement convenable pour se développer correctement. À défaut, la thérapie peut apporter au patient la confiance nécessaire à un moi sain. Au début de sa carrière, Erikson était analyste pour enfants et se distinguait des psychanalystes traditionnels en travaillant avec la famille du patient.
Psychothérapie de l'enfant
La psychothérapie d'enfants, développée à l'origine par Anna Freud et Mélanie Klein, utilise les mêmes cadres de référence que celle des adultes, le thérapeute devant cependant constamment garder à l'esprit le stade de développement de son patient. Les techniques de communication sont différentes dans la thérapie pour enfants : le jeu y devient un des éléments importants du discours qui se met en place. En France, des psychanalystes comme Françoise Dolto et Maud Mannoni ont contribué, avec leurs nombreux ouvrages, à populariser la psychanalyse d'enfants.
Les psychothérapies humanistes
S'appuyant sur des conceptions optimistes de la nature humaine, les thérapies humanistes créditent l'homme d'un potentiel de bonté.
Carl Rogers
Le psychologue américain Carl Rogers élabora la psychothérapie «centrée sur le client». Rogers pensait que les organismes humains ont une tendance innée à se maintenir et à s'améliorer; cette tendance les pousse vers le progrès, la maturité et l'enrichissement de la vie. Chaque personne est capable de se comprendre et de mener des changements constructifs. Le potentiel peut être découvert avec l'aide d'un thérapeute.
Rogers attachait plus d'importance aux attitudes du thérapeute qu'à sa formation technique ou à son talent; il préférait le terme de «client» à celui de «patient» pour indiquer que le traitement n'était ni manipulatoire, ni de nature médicale. La psychothérapie dite non-directive de Carl Rogers prône la neutralité ou la non-intervention du thérapeute, qui doit se contenter d'écouter le patient. Pour Rogers, le traitement consiste à favoriser la reproduction des attitudes du thérapeute par le client. L'écoute du thérapeute permet au client de prêter attention à des pensées et des sentiments de plus en plus effrayants, jusqu'à l'atteinte d'un niveau d'acceptation de soi permettant les changements et les progrès.
La gestalt-thérapie
La gestalt-thérapie est une autre approche humaniste qui fut développée par l'Allemand Frederick S. Perls. Psychanalyste de formation, Perls pensait que la civilisation moderne produit immanquablement des névroses, parce qu'elle oblige les gens à refouler leurs désirs naturels; elle contrarie une tendance profonde de l'homme à ajuster sa biologie et sa psychologie à l'environnement et provoque des névroses d'angoisse. Les soins passent alors par le rappel à la conscience des besoins insatisfaits. Perls élabora une thérapie corporelle et proposa notamment au patient des exercices d'amélioration de la perception des émotions, de l'état physique et des besoins réprimés. La gestalt-thérapie est une thérapie individuelle ou de groupe, qui comporte généralement une séance hebdomadaire sur une période qui peut aller jusqu'à deux ans.
La thérapie comportementale
Contrairement à la plupart des thérapies proches de la psychanalyse, la thérapie proposée par le behaviorisme ne repose pas sur une théorie des névroses. Elle est plutôt une application de méthodes de la psychologie expérimentale aux problèmes du patient. Les thérapeutes sont souvent des psychologues; ils ne s'intéressent pas directement aux forces psychologiques sous-jacentes mais au comportement qui engendre le malaise du sujet. Pour eux, tous les types de comportement, normaux ou inadaptés, sont appris en fonction de principes bien précis, qui ont été étudiés en détail, notamment par le Russe Ivan Pavlov et par l'Américain Burrhus Frederic Skinner. Les thérapeutes behavioristes pensent qu'on peut utiliser ces principes de conditionnement et de déconditionnement pour corriger les comportements dont on souffre.
Dans tous les cas, les thérapeutes comportementaux débutent le traitement en recherchant toutes les informations disponibles sur le problème du patient et les circonstances de son apparition. Ils ne cherchent pas à en déduire des causes ou des significations cachées; ils s'intéressent surtout aux phénomènes observables et mesurables. Cette analyse comportementale leur permet de formuler des hypothèses sur les circonstances qui génèrent et entretiennent le problème; ils peuvent alors commencer à modifier ces circonstances une à une, tout en observant les modifications du comportement du patient.
Désensibilisation
La désensibilisation systématique est l'une des plus anciennes et l'une des plus fréquentes des nombreuses techniques employées par les thérapeutes behavioristes. Cette méthode fut développée par le psychiatre sud-africain Joseph Wolpe. Destinée à traiter les symptômes d'angoisse profonde, elle apprend au patient à se détendre et à approcher progressivement des situations ou des objets qui l'effraient.
Les approches cognitives
Les thérapeutes comportementaux accordent depuis peu une attention nouvelle à l'influence de la pensée sur le comportement, sous l'influence de chercheurs comme le psychologue américain Albert Bandura. La thérapie cognitive utilise l'approche behavioriste pour modifier les croyances et les habitudes de pensée qui paraissent être la cause du malaise du sujet.
Selon le psychologue américain Albert Ellis, les désordres émotionnels proviennent de croyances irrationnelles et de pensées illogiques. Lorsqu'il traite ses patients, il les confronte à ce qu'il considère être leur «irrationalité» et les encourage à la remplacer par des pensées et des émotions plus rationnelles. Le psychologue américain Aaron T. Becks a développé une technique semblable. Les approches comportementales et cognitives paraissent parfois n'être que des versions enrichies de l'autosuggestion préconisée par le psychothérapeute Émile Coué. Néanmoins on doit à l'approche cognitive une mise en perspective radicalement nouvelle et prometteuse de l'autisme.
La thérapie de groupe
La psychothérapie de groupe présente l'avantage d'être moins coûteuse que la thérapie individuelle; par ailleurs, elle a la vertu de démontrer au patient que son problème n'est pas unique. On considère que les principaux changements et progrès observés en thérapie de groupe proviennent des interactions entre les membres du groupe; le thérapeute est chargé d'encourager ces interactions et de les contrôler.
Origines
La thérapie de groupe est apparue en Europe et aux États-Unis au début du XXe siècle. En Europe, le psychiatre Jacob L. Moreno fut le premier à l'utiliser. Il amenait ses patients à améliorer la prise de conscience de leurs problèmes en leur faisant jouer leur propre rôle. Le «psychodrame» de Moreno s'est répandu dans le monde entier; il est utilisé pour le traitement des patients névrosés et psychotiques et pour la formation de praticiens du domaine psychiatrique.
On emploie aujourd'hui de multiples formes de psychothérapie de groupe, qui connaissent les mêmes orientations théoriques que les thérapies individuelles. Des thérapeutes voient leurs patients individuellement et en groupe.
Les thérapies familiales
La thérapie familiale est une application particulière des thérapies de groupe. Dès les années 1930, Adler travailla avec des familles, mais il fallut attendre le début des années 1950 pour que d'autres thérapeutes commencent à traiter les familles plutôt que les individus. Ce mouvement thérapeutique part du principe que les relations familiales habituelles affectent profondément les problèmes psychologiques d'un membre de la famille, qui les influencent en retour. Plutôt que d'explorer les conflits internes des individus, les thérapeutes familiaux s'efforcent de promouvoir les interactions entre les membres de la famille, essayant d'améliorer ainsi le bien-être de chacun.
Psychothérapies brèves et interventions de crise
Les psychothérapies brèves ont été développées pour proposer des thérapies d'une durée plus limitée que celle de la cure type et pour répondre à de situations de crise. Les individus sont en effet plus susceptibles de changer, en bien ou en mal, lors d'une période critique de la vie, telle que le décès d'un proche. Une intervention peut alors les aider à surmonter la crise, voire les aider à devenir plus forts psychologiquement qu'ils ne l'étaient avant la crise.
On peut envisager deux types de psychothérapie brève. Le premier s'attache à supprimer l'angoisse et recourt à des techniques de soutien telles que le renforcement de la confiance, la suggestion, la manipulation de l'environnement et les médicaments. Le second utilise des techniques qui provoquent l'anxiété, afin de perturber les défenses névrotiques habituelles du patient et de permettre des changements. La psychanalyse elle-même est une technique génératrice d'angoisse; aussi les premières thérapies conduites par Freud duraient-elles moins d'un an.
La formation du thérapeute
Les psychothérapeutes proviennent souvent du milieu médical, de la psychologie et du secteur social. Leurs formations sont très dissemblables, bien que leurs pratiques cliniques concrètes puissent être assez proches.
Les psychiatres sont des médecins. Dans de nombreux pays, ils suivent la filière d'études médicales pendant plusieurs années, puis suivent une formation clinique. Ils sont ensuite formés en psychiatrie pendant une période de stage d'environ trois ans. Les futurs psychanalystes doivent faire une analyse personnelle avant de pouvoir exercer en tant qu'analystes.
Les psychologues doivent normalement détenir un doctorat en psychologie clinique et suivre un an de pratique thérapeutique, sous supervision, avant de pouvoir exercer. Les travailleurs sociaux se spécialisent en santé mentale et passent une maîtrise ou un doctorat avant de pratiquer. À l'instar des psychanalystes, certains psychologues et travailleurs sociaux poursuivent leur formation dans des instituts consacrés à une école particulière de psychothérapie, et nombre d'entre eux entrent également en thérapie. Les infirmiers et infirmières psychiatriques ont généralement un diplôme de maîtrise et exercent principalement en milieu hospitalier.
Évaluation
Les différents types de psychothérapie poursuivent des buts différents, de l'ambition psychanalytique de modification de la structure profonde de la personnalité et de traitement des dilemmes existentiels à la visée plus pratique du thérapeute behavioriste qui cherche seulement à faire disparaître des symptômes pénibles. On doit donc évaluer chacune des méthodes de traitement par rapport aux objectifs qu'elle s'assigne.
La disparition d'un symptôme est plus visible que les résultats plus étendus et plus profonds d'une psychanalyse. Les thérapies behavioristes et les autres thérapies directives et limitées peuvent fournir des preuves d'une validité scientifique supérieure à celles de la psychanalyse et des méthodes proches.
On a essayé de remplacer les études de cas, autrefois utilisées comme témoignages des succès d'une méthode, par la méthodologie appliquée lors de l'évaluation d'un nouveau médicament. Cette méthode compare une sous-population de patients bénéficiant d'une version standard du traitement à d'autres patients qui reçoivent un autre traitement. Ces études permettent de déterminer quel traitement est le mieux adapté à un type de patient particulier. Ce degré de spécificité est resté jusque-là hors de portée des chercheurs, à une exception près : la thérapie behavioriste semble particulièrement adaptée au traitement des manies.

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